Gironde 33 / Lot-et-Garonne 47
Entre vieillir chez soi avec ses aléas ou être pris en charge au sein d’une structure sans pouvoir de décision, une association a souhaité apporter une alternative aux personnes vieillissantes à travers l’habitat partagé concerté. Construit ensemble, étape par étape dans son territoire de vie, le projet et sa réalisation sont uniques à chaque fois. La méthode s’appuie sur le temps et la confiance.
Comment apporter une réponse en matière d’habitat auprès des personnes retraitées en ruralité et sortir du système binaire consistant à faire le choix entre vieillir chez soi ou dans un lieu collectif sans pouvoir de décision ? La proposition est issue de la réflexion d’un collectif de huit citoyens-nes aux liens personnels ou professionnels dans les secteurs du social, du soin, de la construction et du BTP. « On s’est interrogé sur ce qui existait et ce dont on aurait envie pour nous ou nos proches. Il a fallu abandonner certaines idées pour rester dans un projet réaliste comme fixer le montant maximal du loyer et ne pas penser systématiquement à l’habitat intergénérationnel, plus dans nos têtes que dans le souhait des personnes retraitées que nous avons consultées, pour bâtir le projet » raconte Florence Deslile-Errad, issue de l’économie sociale et solidaire et cofondatrice de l’Association initiale d’Habitats des possibles.
La méthode conçue et qui fait ses preuves depuis 7 ans est toujours la même pour un résultat toujours unique, propre au groupe qui va se constituer. « On va là où les communes souhaitent entreprendre un projet d’habitat participatif, en prêtant attention à la demande afin de voir si elle correspond à un désir de personnes sur ce territoire. On n’impose rien et surtout pas une manière de vivre et l’on s’assure de partager les mêmes valeurs. Si cela est réuni on peut démarrer.»
De l’idée à la réalisation : prendre le temps nécessaire
Au départ, le projet exprimé par une commune rurale est associé le plus souvent à la proposition d’un habitat à rénover situé sur la commune. L’envie de décider ensemble, de faire ensemble, est déterminante pour l’association qui dit ne rien lâcher dans le sens où ce qui est dit et validé sera fait. « Dans chaque projet, les retraités du territoire sont sollicités pour participer à travers des ateliers à la conception architecturale du futur lieu. Le groupe va ainsi fluctuer en nombre au cours du temps, entre ceux qui viennent se renseigner, ceux qui vont adhérer à la démarche mais qui abandonneront et ceux qui s’engageront. De l’idée à la réalisation le temps nécessaire se situe autour de 5 ans à ce jour mais on souhaiterait le ramener à 4 ans.»
Une maison à construire mais aussi un projet de vie
Durant cette période, tous les domaines, toutes les questions sont abordés pour définir le cahier des charges. Il est propre à chaque groupe qui se crée pour construire la maison idéale avec ses logements, leur agencement et ses parties communes. A Lestiac-sur-Garonne, première réalisation de l’association, inauguré en juin 2022, la maison rénovée, lieu de l’ancienne école communale, accueille 9 locataires, de 62 à 91 ans, dans 445 m2 dont près de la moitié avec le jardin constitue les espaces partagés. « La réalisation est faite à partir des choix énoncés dans les ateliers. Nous veillons à ce que tout soit respecté ensuite en matière de réalisation. De même l’envie de mutualiser, s’exprime différemment selon les personnes et va définir le projet de vie de la maison. »
ITVB : Comment les réalisations d’ailleurs construisent les projets d’ICI ?
« Depuis le début de notre projet, nous échangions avec les Belges. Ils ont fait le choix bien souvent d’une autogestion de l’ensemble, espaces privés et espaces communs. Ils ont une grande expérience notamment dans les processus de décision d’un groupe. Ils ne sont pas dans la prise en charge. Ce qui nous a plus, c’est leur sagesse, leur position sur la mise en confiance et le respect de la liberté de chacun.»
Un réseau social et des financeurs
L’association "Habitats des possibles", aujourd’hui structurée en coopérative, accompagne trois projets actuellement en Gironde et dans le Lot-et-Garonne, grâce à une coopération d’acteurs solidaires et un fort réseau de financeurs, qui vont des collectivités locales aux fondations en passant par les bailleurs sociaux, les caisses de retraite.
Et, l’appui de bénévoles experts dans leur métier
Si l’équipe "d'Habitats des Possibles" est composée de salarié-e-s présent-e-s sur le territoire, la structure donne une large place aux bénévoles, une quinzaine à ce jour, mettant à disposition du temps d’expertise. « À chaque fois que l’on a un problème sur le terrain, les experts bénévoles se réunissent et trouvent la solution que l’on applique. Le principe est simple, rapide et efficace. Nous tenons à ce collectif de bénévoles métiers.»
Les trois coups ! Selon Florence Delisle-Errard
> Coup de chapeau : « A la communauté de bénévoles, aux financeurs, aux élus qui croient en ces projets, chacun y tient son rôle et ne peut exister sans les autres.»
> Coup de main : « On aurait besoin de bénévoles, pour étoffer notre équipe d’experts en BTP, en habitat social… constituée de personnes en activité. Le travail en collectif est très apprécié par les membres qui se réunissent le soir.»
> Coup de projecteur : « A la coopérative funéraire Syprès à Bordeaux, qui ont une approche sensible, humaine et fine pour accompagner les personnes dans ces moments-là. »
En savoir plus : https://www.habitatsdespossibles.org/